Histoire de piaf
Demandez à quelqu'un dans la rue de vous citer un oiseau, si vous vous trouvez dans une grande ville, je fais le pari qu'il vous dira pigeon ou moineau. C'est de cette dernière espèce que je vais parler un peu aujourd'hui. D'ailleurs, soyons précis, c'est bien du Moineau domestique (Passer domesticus) dont il s'agit, parce qu'il existe en France métropolitaine deux autres espèces de moineaux moins répandus et moins communs. Dans l'imaginaire collectif, mais aussi et surtout dans la nature, le moineau est associé à l'homme. Il est ce qu'on appelle un commensal, c'est à dire une espèce qui bénéficie de la présence d'une autre espèce (en l'occurrence nous !) sans lui procurer d'avantage ou de handicap. Cette relation de commensalisme a très certainement débuté il y a environ 10 000 ans dans le croissant fertile où l'homme a domestiqué pour la première fois les céréales dont le moineau est friand. Aujourd'hui, il fréquente assidûment nos mangeoires ainsi que les silos à grains mais qu'en était-il avant la sédentarisation et le développement de l'agriculture humaine ? En Asie centrale, il existe une sous-espèce de moineau domestique qui semble avoir conservé le mode de vie ancestral, et qui vit dans des prairies plus ou moins humides indépendamment des populations humaines. Cette sous-espèce se nourrit également de graines de graminées. Une étude récente a comparé la morphologie de cette sous-espèce avec celle de plusieurs sous-espèces commensales de l'homme et constaté que les non-commensaux avaient en moyenne une morphologie légèrement différente, notamment des becs moins pointus et des crânes moins robustes. La domestication des céréales par l'homme s'est traduite par une augmentation de la taille des graines et certainement de la force nécessaire à leur consommation. Il semble donc que notre histoire ait eu des conséquences sur l'histoire évolutive des moineaux, ce qui n'est pas surprenant puisque nous faisons partie intégrante des écosystèmes et que nous imposons certaines contraintes ou offrons certaines opportunités aux êtres vivants que nous cotoyons. Le moineau a profité de notre développement et présente aujourd'hui une répartition cosmopolite ce qu'il doit aussi à l'homme qui l'a introduit accidentellement dans de nombreuses régions du monde comme des îles sur lesquelles il est arrivé par bateau. Cependant, il est en déclin dans certaines grandes agglomérations, les raisons de cette tendance demeurant obscures. Il nous reste donc encore beaucoup à découvrir sur le piaf, pourtant si proche de nous !
